Josette (02/03)

« Tu peux aller danser, si tu veux ».

Elle se leva, verre en main, et se mit à danser langoureusement entre les tables. Aana me disait combien elle était heureuse depuis que je lui avais présenté Élodie. L’une comme l’autre avait besoin de stabilité. Le contraire de la relation que j’avais avec elle. Il faut dire que j’étais jeune, plus jeune qu’elle, et mes études étaient, et sont toujours, très importantes pour moi. Elle m’avait donné le choix, elle ou mes études. Et j’avais choisi.

Aana est née en 1984, à Ivanovo, en Russie. Cette ville a une particularité, en Russie, elle est appelée « la ville sans hommes ». Bien évidemment, il y a des hommes mais la proportion est tellement faible qu’elle a obtenu ce titre « honorifique ». Il n’est pas précisé que c’est, logiquement, la ville qui compte le plus grand pourcentage de lesbiennes au nombre d’habitants. Dans ce pays où cela est encore considéré comme une maladie, personne ne se vantait de préférer les femmes. Mais vivre toujours caché, ce n’est pas vivre. Selon Aana. Après de brillantes études universitaires, sanctionnées par une maîtrise en Sciences Statistiques, elle était revenue dans sa ville. Mais devant l’impossibilité de vivre au grand jour, elle avait décidé, seule, de partir en France, pays des droits de l’homme. Elle pensait trouver facilement un travail à la mesure de ses compétences mais ses diplômes ne sont pas reconnus en France. Elle a donc atterri à Rennes, répondant à une annonce qui cherchait une serveuse. Elle arrivait donc à Rennes en même temps que moi. Après mon bac, obtenu avec mention, je poursuivais mes études avec un BTS Comptabilité dans un lycée rennais qui m’avait accepté. Pour cela, je devais vivre dans une famille d’accueil.

Je n’ai pas une grande famille et je ne la vois pas très souvent. Mis à part mes parents, et mes grands-parents, quand ils étaient vivants. Ma mère n’a qu’une sœur, Angélique, qui vivait à Nantes. Mariée à l’époque, deux enfants. Mon père, lui, a un frère et une sœur. Dont il ne sait rien. Elle est partie un jour se marier dans l’Est de la France et n’a jamais plus donné de signe de vie. Restait donc les deux frères. Chacun avec leur caractère. Évidemment, je connais plus mon père et j’aurais tendance à le défendre. Car ils ne se parlent plus. Enfin, tant que le gouvernement est à gauche. Sous Chirac, puis Sarkozy, je voyais parfois mon oncle et sa famille. Mais il est obtus et ne veux pas voir son frère, plutôt du côté socialiste, quand la droite ne dirige pas le pays. Pourtant, il a su que je cherchais un hébergement sur Rennes pour mes études et il a contacté ma mère pour lui donner l’adresse d’une cousine à sa femme qui avait des disponibilités. C’est ainsi que j’emménageais chez Josette et sa famille. C’est en allant à la piscine que je vis Aana pour la première fois. Je l’avais d’abord remarquée sur le plongeoir. Elle était très douée. Puis, on s’est retrouvées dans des lignes d’eau voisines. On était toutes deux de même niveau et je dois dire que j’étais heureuse de trouver enfin une fille aussi forte qu’elle pour nager avec moi.

Puis, un jour, dans les douches. Je l’observais en coin. Je souriais en la voyant essayer de se laver la poitrine sans ôter son haut de maillot. On était seules et j’enlevais le mien totalement, je nage avec un maillot une pièce en piscine. Et je continuais à me laver comme si j’étais toute seule. Rassurée, elle ôta le haut définitivement. Elle m’expliqua plus tard que, étant étrangère, elle ne voulait surtout pas se faire remarquer par un comportement incorrect, ou indécent. La fois suivante, je la vis se précipiter vers les douches quand j’y allais. Elle se mit nue la première, tout près de moi. On se frôlait parfois. Attouchements qui devinrent des caresses. Cela aurait pu durer si une femme n’était venue nous déranger. On se couvrit d’une serviette pour sortir des douches et on partagea la même cabine. À peine entrées, les serviettes tombaient et les caresses reprirent. Elle a un corps sublime, Aana. Un vrai top model.

De baisers fougueux en caresses ultra-précises, nous sommes vite arrivées l’une comme l’autre au bord de l’extase. Je l’ai suivie chez elle pour une nuit de folie. Je suis même restée le week-end entier. J’avais prévenu Josette que je rentrais à Nantes. Seuls mes parents savaient réellement où j’étais. À partir de ce moment-là, on ne se quittait presque plus. Je gardais l’hébergement chez Josette, mais passais tout mon temps libre avec ma chérie. C’est face à Josette et ses enfants, au cours d’un dîner, que je leur apprenais que j’étais lesbienne. Un choc pour André, son fils, qui essayait de me draguer. Ses sœurs le prirent plutôt bien. Josette ne savait pas comment réagir. Elle parût soulagée quand je lui appris que ma famille était au courant depuis longtemps. Parlons un peu des membres de la famille. André, le plus jeune, 15 ans. Je pense qu’il est, était amoureux de moi jusqu’à mon annonce. Quand j’allais prendre une douche, j’entendais sa porte s’ouvrir. Des pas qui s’arrêtaient à la porte de la salle de bains. J’avais pris l’habitude de placer une serviette qu’il ne puisse rien voir à l’intérieur. Je l’entendais se masturber tout contre la porte, quand je coupais l’eau. Un jour excédée, je suis venue ouvrir la porte, violemment. J’étais habillée évidemment. Il fut surpris de me voir mais n’arrêta pas sa branlette.

« Et c’est avec ton minuscule robinet que tu comptes me faire jouir!!! »

Il est reparti dans sa chambre, vexé. Mais jamais il ne recommença. Béatrice, 17 ans, belle brune pulpeuse. Elle était souvent de sortie, avec des copines, ou des copains plutôt. Hétéro, je pense, et elle n’était certainement plus vierge depuis longtemps. Elle vivait sa vie, moi, la mienne et tout était pour le mieux. Dominique, 19 ans, était beaucoup plus réservée. Étudiante, comme moi, sérieuse. Une vraie bosseuse. Son plaisir était de passer des heures à la bibliothèque. Elle adorait lire, et faisait une licence en lettres modernes. Elle, comme sa sœur, ne me calculait presque pas. Jusqu’à mon annonce. À partir de là, elle vint souvent me voir dans ma chambre, me parler de ses lectures, des miennes. Puis, de plus en plus, elle recherchait le contact physique. Une main sur l’épaule, nos bras qui se frôlent. Jusqu’au jour où …

Josette aussi avait été perturbée par mon annonce. Elle s’imaginait fautive. Pourtant, je lui avais bien précisé que cela ne datait pas d’hier et que ma famille était au courant. Je sentais qu’elle avait besoin de comprendre. Elle se posait des questions mais n’osait pas m’en parler. Un matin, j’étais seule avec elle, ses enfants étaient sortis.

« Josette, je te sens distante depuis mon annonce. Tu m’en veux d’avoir été franche ? »

« Mais non, mon bébé, je ne t’en veux pas, bien sûr. La vérité vaut toujours mieux que le mensonge. Seulement, je ne comprends pas bien le plaisir que peuvent avoir deux femmes ensemble. Moi, je n’ai connu que des hommes, dont le père de mes enfants, et je sais ce qu’on fait avec un homme. Mais deux femmes, j’ai plus de mal. »

Elle finissait sa vaisselle et n’osait pas vraiment me regarder dans les yeux en me parlant. Troublée sans doute. On ne parlait jamais de sexe chez elle, pas que c’était tabou, simplement cela devait rester privé. Elle-même, je savais qu’elle n’avait pas eu de relations depuis le départ de son « homme ». Parti chercher des cigarettes. Elle avait su, bien plus tard, qu’il était parti avec l’institutrice de sa fille. Je la rejoignais devant l’évier. Juste derrière elle.

« Si je pose mes mains sur tes épaules, tu ne ressens rien de spécial, mais si je les descends dans ton dos, sur tes hanches. Et que je me colle à toi, déjà tu dois sentir une douce chaleur qui envahit ton ventre. « 

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